jeudi 28 janvier 2016

Fatima El Azadi, la bibliothécaire et la biblio-cinéphile



Titulaire d’un Baccalauréat en Littérature Arabe Bilingue et d’une Licence en Langue et Littérature Françaises en 1992, Fatima El Azadi est passionnée à la fois de littérature arabe et française. Elle a lu, nous précise-t-elle, aussi bien pour Naguib Mahfouz, Abou Alaa Al Maari, Al Akkad, Ghassan Kanafani et d’autres que pour Racine, Baudelaire, Proust, Lucien Goldmann et Julia Kristeva, etc... Cette richesse linguistique est un atout qui, mis en œuvre, lui a permis d’aborder le Monde autrement et trouver une voix personnalisée.

Son mémoire de fin d’études universitaire à la Faculté des Lettres Cadi Ayyad de Marrakech intitulé L’esthétique de la lumière dans les Mille et Une Nuits, n’a pas échappé à cette double culture puisqu’elle a dû lire les quartes tomes en arabe pour écrire ensuite son mémoire en langue française en revisitant le Saint Coran, le grand maître linguiste arabe Ibn Jinni, Bachelard, Malek Chebel et Abdelkebir Khatibi…

Une reconnaissance et gratitude sont exprimées par Fatima El Azadi à tous ses professeurs de la Faculté des Lettres de Marrakech.

Parallèlement à son enseignement et aux heures creuses, Fatima El Azadi prenait un grand plaisir pour assister aux cours d’arabe et de philosophie avec les autres filières. Etudiante studieuse, curieuse mais aussi sportive, elle jouait au basket-ball pendant son temps libre.

Fatima El Azadi est imprégnée, nous raconte-t-elle, d’abord et depuis son jeune âge par sa Famille : son père autodidacte, exemple d’une tendre exigence en ce qui concerne l’Education et le Savoir ; son oncle - le défunt comédien Mehdi El Azadi -; ses sœurs et frères. C'est une famille, nous décrit Fatima El Azadi, comblée par l’amour d’une maman qui a vouée sa vie pour construire une partie lumineuse dans les rouages ténébreux de la vie quotidienne.

A part sa famille, il y a certains professeurs durant son cursus dans l’enseignement public marocain qui l’ont beaucoup marquée aussi bien au primaire, au collège, au lycée qu’à l’université.

Une fois ses études terminées et sa licence en poche, Fatima El Azadi a commencé d’abord à travailler comme enseignante dans une école privée, mais, de jour en jour, elle sentait que ce n’est pas sa place : "Comme un électron libre, toujours, en orbite des atomes qu'il côtoie, délié, présent par force et gracieusement LIBRE", nous décrit Fatima El Azadi. 

Elle a travaillé ensuite comme ouvreuse vacataire dans la salle de cinéma à l’Institut français de Marrakech (IFM), qui fut alors appelé Centre Culturel français (CCF). Durant trois années, vacataire, elle est passée par tous les postes ; ce qui a enrichit chez elle une polyvalence incontournable et une soif jamais assouvie dans le domaine.

Le déclic est enfin arrivé avec Daniel Le Goff, le responsable de la médiathèque,  qui lui a proposé de travailler au sein de la bibliothèque à mi-temps le jour et pendant les spectacles le soir. Suite à quoi, elle a eu l’opportunité en 1995 d’effectuer un stage au sein de la Bibliothèque Publique à Paris pour la création d’un centre de ressources sur la France contemporaine à Marrakech.

Plus tard, c’est la nouvelle directrice nommée Reine Prat qui propose à Fatima El Azadi un nouveau poste qui consiste, tout en étant dans la bibliothèque, à s’occuper des relations externes avec les étudiants des facultés pour l’animation culturelle et se consacrer aussi au Bureau d’Information Universitaire (BIU), le Campus France actuel.

Peu à peu, ses horizons et son carnet professionnel s’élargissent au-delà de son lieu de travail et la direction comptait beaucoup sur elle pour vendre son produit et la met au devant pour élaborer des projets et créer des partenariats extérieurs. Chose que Fatima El Azadi a su mener jusqu’à la réussite et qui lui a permis une titularisation au sein de l’entreprise.

Depuis, Fatima El Azadi a pu s’enrichir de ces diverses expériences qui ont favorisées l’enrichissement de ses capacités pour éclairer ses actions, ses actes quotidiens et au contact des autres. "La culture et rien que la culture pour  une ouverture de l’esprit et de l’âme. Un enrichissement en se documentant, en étant curieuse sur tous les domaines et surtout sur les sciences sociales et l’art où je m'épanouis aujourd’hui.", nous explique Fatima El Azadi.

A bras ouverts de nouveaux horizons, des ambitions, des projets culturels durant quinze année de suite. La bibliothécaire se confirme de jour en jour, doucement mais sûrement. Une carrière égayée par la formation continue et couronnée par un Master - Formation à distance en Bibliothéconomie et Sciences de l'information et la documentation.

Chaque rencontre est porteuse d'un changement possible, En 2007, Vincent Melilli lui propose de créer la médiathèque à l’Ecole Supérieure des Arts Visuels (ESAVM), nouvellement ouverte à Marrakech, et d’en devenir la responsable.

D’une part, il s’agit d’un travail colossal au niveau de la constitution des collections de monographies, périodiques, thèses, documents audiovisuels et électroniques en fonction des disciplines enseignées et du public qui fréquente la médiathèque. D’autre part, il faut développer, gérer et valoriser le fonds tout en assurant sa conservation et sa pérennité.

Pour répondre à la variation pédagogique et la richesse du monde audiovisuel, la bibliothécaire a dû "réinventer" la classification décimale Dewey et une indexation spécifique à l’organisation de son fonds et permettant une fluide localisation.

"La médiathèque prend le rôle d’intermédiaire pour que les projets pédagogiques reposent sur l’articulation entre une approche pratique-créative et une approche culturelle en offrant les références documentaires nécessaires et en favorisant la recherche et la lecture", nous confirme Fatima El Azadi.

Depuis presque dix ans maintenant et grâce à l’engagement de cette biblio-cinéphile - Fatima El Azadi - et toute l’équipe de l’ESAV dirigée par Vincent Melilli, Marrakech se dote d’une valeur ajoutée : Un fonds spécialisé. Il s'agit d'un fonds documentaire incontournable, multilingue dédié à l’Art, le Cinéma et la Culture en général.

Cette médiathèque est ouverte aux étudiants de l’ESAV, mais aussi aux chercheurs dans le domaine notamment aux étudiants de l’Université Cadi Ayyad.

Passionnée de livre mais aussi de cinéma, Fatima El Azadi s’occupe également de la programmation cinématographique de la salle de cinéma de cette école. Son rêve est de créer à présent un fonds "Pôle de compétence" dédié au cinéma marocain. Une bouteille est lancée à l’eau, à bon entendeurs.

« Oui, j'ai encore des étagères vides dans ma bibliothèque et tant mieux, sinon quel ennui », nous confie Fatima El Azadi.

Fatima El Azadi nous explique finalement que son expérience est acquise à l’IFM certes, mais la maturité culturelle et professionnelle est le fruit de son expérience à l’ESAV Marrakech. Cette amoureuse des livres et des bibliothèques croit bien à ce dicton qu’elle partage avec nous : "Avec tout ce que je sais, on pourrait faire un livre...il est vrai qu'avec tout ce que je ne sais pas, on pourrait faire une bibliothèque." de Sacha Guitry le réalisateur…

* Je tiens à remercier Fatima El Azadi d'avoir accepté de partager tous ces détails sur son parcours passionnant et je tiens à la remercier également pour la photo.

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